Deux degrés d'espoir

Marcher dans la neige avec des bottes d'hiver quand il fait deux au-dessus de zéro, c'est comme marcher pieds nus dans le sable sur une plage des Caraïbes. On se console comme on  peut.

Drôle d'oiseaux

Chaque hiver, nous apercevons quelques cerfs de Virginie du  côté sauvage de la clôture. Cette année, une bande de cinq, toujours les mêmes, vient nous visiter régulièrement. Il y a aussi un renard roux qui passe faire son tour. Nous avons pu constater que les cerfs s'en méfient. Pourtant, ils ne font pas partie de son régime alimentaire...en tout cas pas dans cet état.
L'installation des mangeoires n'est probablement pas étrangère à cette recrudescence de la faune: graines, oiseaux, rongeurs, brouteurs, carnassiers. Il ne reste plus que les chasseurs pour compléter la chaîne. Que le lobby se rassure; ils ne sont pas loin. 200 mètres seulement nous protègent des coups de fusils. Au-delà, le promeneur doit faire confiance à l'habileté et à l'intelligence des nemrods; autant dire que la vie ne tient à rien. 

Tout n'est pas blanc chez les harfangs

Tous les harfangs des neiges ne sont pas blancs. Seuls les mâles adultes peuvent le devenir; les femelles et les juvéniles ont un plumage plus ou moins moucheté de noir. Ils éclaircissent avec l'âge, mais les femelles garderont une forte proportion de noir.
La photo montre une jeune femelle capturée cet hiver dans un aéroport de la région de Montréal. Comme c'est le cas en général, elle était couverte de mites. Ces parasites, dont on voit deux exemplaires sur le bord extérieur gauche du disque facial, vivent dans son plumage. C'est à vous dissuader de la tenir... à moins que ce soit ses serres.


Chaque hiver, le sud du Québec se transforme en villégiature pour harfangs. Ils s'installent dans des endroits très dégagés, grandes terres agricoles ou aéroport, qui leur rappellent probablement leur toundra natale. Il s'agit majoritairement de juvéniles et de mâles; les femelles ayant tendance à hiverner plus au nord.
Depuis les années 50, une rumeur, d'autant plus tenace quelle trouve son origine dans le milieu scientifique, veut que ces mouvements soient cycliques et qu'un pic d'abondance se produise tous les 4 ans environ. La théorie veut que ce cycle d'irruptions suive celui de la population des lemmings. Quand ces derniers abondent dans le Grand-Nord, les harfangs ont tendance à rester là-haut et à se faire plus rares dans le sud en hiver; quand la population des lemmings s'effondre, les harfangs débarquent. La logique de cette théorie satisfait tellement l'intellect qu'elle est très vite assimilée. Je l'ai moi-même maintes fois répétées au cours d'excursions et je crois même l'avoir déjà écrite dans ce blog.
Pourtant, tout indique que les choses sont un peu plus compliquées que çela. Premièrement, l'irruption hivernale des harfangs n'est pas cyclique partout au Canada. Dans les plaines du centre, ses effectifs semblent assez constants d'un hiver à l'autre. Dans l'ouest, les invasions sont beaucoup plus épisodiques et il peut se passer quelques hivers sans qu'on observe un harfang. Et dans l'est, les cycles ne sont pas tout à fait aussi réguliers qu'on le prétend; leur intervalle varie plutôt entre 3 et 6 ans. Enfin, l'abondance des observations n'est pas synchrone d'est en ouest du pays.
Ce qui est intéressant chez le harfang, c'est que contrairement à d'autres oiseaux, il ne semble pas complètement attaché à un territoire. Ainsi, les jeunes et les femelles ne retournent pas nécessairement sur le lieu de nidification de l'année précédente. Un marquage avec des émetteurs radio suggère qu'ils ont un comportement plus nomade, pouvant se déplacer sur de grandes distances du nord au sud et d'est en ouest et ne nichant que lorsque les conditions alimentaires sont propices.
En tout cas, si vous n'avez jamais vu de harfangs, sachez que c'est une bonne année pour le faire, car on en a rarement rapportés autant dans le sud du Québec.