Mea culpa, mea maxima culpa

Voilà, on écrit pour l'internet et on oublie qu'on ne maitrise pas la destination et la portée des messages. Le billet précédent sur la salamandre cendrée était un acte mal réfléchi. Il est la démonstration qu'en voulant attirer l'attention sur le vivant et promouvoir la défense de l'environnement, on risque aussi de lui nuire; l'enfer n'est-il pas pavé de bonnes intentions ?.
Heureusement, j'ai peu de lecteurs et ce sont des personnes conscientes de leur impact sur l'environnement. Mais, comme je le disais plus haut, je n'ai aucune influence sur la portée du message. Alors dans le doute et selon le principe de précaution, je préfère m'abstenir ou rectifier.
Quel est le problème du billet précédent, billet dont j'ai changé le texte ? Débordant de l'enthousiasme de ma découverte, je donnais quelques trucs pour trouver des salamandres et donc les déranger. Finalement, j'incitais indirectement les lecteurs à faire aussi mal que moi.
Je dois préciser que je ne cherche pas à tout prix des salamandres, ni toute autre forme de vie d'ailleurs. Je suis curieux mais capable de réfréner ma curiosité. Mon plaisir se limite bien souvent à me promener et à anticiper quelle forme de vie j'ai le plus de chance de croiser en fonction de l'habitat que je fréquente. Savoir quel mammifère pourrait habiter dans le creux d'un arbre, quel oiseau pourrait chanter dans une forêt de conifères et quel batracien pourrait vivre sous cette latitude me suffit amplement. 
Mais pour ça, il faut avoir retourner des pierres, regarder dans le creux des arbres, appris à reconnaître les oiseaux, avoir lu, explorer, expérimenter, et même pécher des grenouilles, élever des escargots, des araignées et j'en passe. Alors, j'encourage tout le monde et surtout les enfants à en faire autant. La pire chose qu'on puisse faire à la nature, c'est d'ignorer sa présence.  

Salamandre cendrée, Plethodon cinereus, Redback Salamander

On se crée parfois sa propre prison. Par exemple les salamandres, j'avais fait une croix sur leur observation, me disant que si le hasard ne m'avait pas encore permis d'en voir, c'est qu'elles étaient plutôt rares et que l'effort n'en valait peut-être pas la chandelle. J'avais bien déjà soulevé quelques vieilles souches vermoulues et quelques pierres dans des boisés humides, mais sans succès. Ma blonde y croyait encore, moi plus trop. Je me contentais d'admirer, non sans jalousie, les observations des autres.


Mais voilà, on finit par rencontrer des personnes qui en ont vu. D'abord la conjointe d'un biologiste qui  raconte comment elle l'a accompagné dans des inventaires et qui vous explique quelques trucs pour les trouver. Et puis Sarah Noël , une généticienne qui a publié sur la salamandre et qui se montre surprise que nous n'en ayons pas encore vu, tant certaines sont abondantes. Alors, on se dit: "pourquoi pas nous ?" et on devient plus attentif.


Récemment, au cours d'une excursion dans les Cantons de l'Est, nous sommes tombés sur un panneau d'interprétation expliquant que la salamandre pourpre, une espèce rare au Québec, habitait les lieux; un signe supplémentaire. En poursuivant la promenade, nous trouvons des vieilles planches livrées aux mousses et aux champignons, restes de la construction mal planifiée d'une passerelle. En en soulevant une, pour vérifier son état, nous voyons quelque chose bouger...Un ver ? Étrange, il y a comme une tête. On regarde de plus près et on voit des pattes. Surprise, une salamandre. Surprise en effet, car, mal documentés et restés sur l'impression laissée par la découverte d'un cadavre de salamandre maculée quelques années auparavant, nous cherchions quelque chose de plus gros.

    
La salamandre cendrée fait partie de l'ordre des urodèles qui regroupe les salamandres, les nectures et les tritons. Au Québec, on compte une seule espèce de necture (famille des protéidés), une seule espèce de triton (famille des salamandridés), 8 espèces de salamandres (famille des ambystomatidés et des pléthodontidés) et des salamandres hybrides entre la salamandre de Jefferson et la salamandre à points bleus qui forment le complexe de la salamandre de Jefferson. Certaines espèces sont douées d'autotomie, c'est-à dire que leur queue ou une partie de celle-ci se détache spontanément du corps quand on exerce une pression dessus; un excellent moyen d'échapper à un prédateur.
La salamandre cendrée fait partie de la famille des pléthodontidés, qui sont dépourvus de poumons et qui respirent par le palais et par la peau. C'est l'une des plus abondantes au Québec. Elle ne dépasse pas les douze centimètres et peut prendre des colorations tellement variées qu'il vaut mieux se fier à son ventre grisâtre pour l'identifier.     

Clématite de Virginie, Clematis virginiana, Devil's Darning Needles

Aussi belle en graines qu'en fleurs, Marie-Victorin la dit générale au Québec. Jusqu'à celle-là, je ne l'avais vu que dans le parc du Mont-Tremblant (Laurentides). Quant au spécimen de la photo, nous venons de le trouver au pied du Mont Saint-Bruno sur un chemin que nous fréquentons pourtant régulièrement. La clématite était dans son habitat: en lisière, au bord d'un fossé encore très humide malgré la sécheresse ambiante. Cétait le seul exemplaire.
J'ai lu quelque part que la médecine populaire nord-américaine l'utilisait entre autres pour soigner les plaies et les coupures. Étonnant car sa cousine européenne, la clématite des haies (Clematis vitalba), qui lui ressemble beaucoup, fait tout le contraire. Dans le but d'inspirer pitié aux passants, les mendiants s'infligeaient des plaies ou des marques sur la peau en se frottant avec sa sève irritante; d'où le nom d'Herbe aux gueux qu'on lui a donné et qui s'est transporté au Québec pour désigner la clématite de Virginie.