Les larmes du Dieffenbachia


Dans un coin du salon, près de la fenêtre, j'ai un vieux dieffenbachia, souvenir d'une autre vie postdoctorale et biophysico-pharmaco-physiologique. 
Contrairement aux saules qui ne sont pas si inconsolables qu'on le chante, mon dieffenbachia n'en finit plus de pleurer. Est-ce la nostalgie de ses jeunes années ou le spectacle de la rue enneigée qu'il contemple par la fenêtre et lui fait regretter sa terre natale ? Toujours est-il que, tous les matins, j'éponge ses larmes.


Soucieux de son état d'âme, il fallait que je trouve une explication et une solution. J'ai donc entrepris un voyage au Panama pour visiter sa famille. À ma grande surprise, j'y trouvais des individus tout aussi éplorés malgré la chaleur et la moiteur du climat et en arrivais à la conclusion que la mélancolie est inscrite dans les gènes des dieffenbachias.
Comme quoi, on peut arriver aux bonnes conclusions à partir d'hypothèses et de raisonnements complètement erronés. Car effectivement (je l'ai appris par hasard au retour) ces larmes sont un trait de caractère inscrit dans les gènes de la plante. Il affecte certaines espèces qui poussent dans des milieux saturés ou presque en eau. Le phénomène, appelé guttation, leur permet de maintenir l'absorption d'eau et des éléments minéraux par leur racine.
Cette absorption racinaire et l’ascension de la sève brute dans la tige sont des phénomènes indispensables à la survie de la plante. Entièrement "passifs", ils ne dépendent que de l'appel d'eau créé par l'évaporation au niveau des feuilles. Si la teneur en vapeur d'eau de l'air augmente, l'évaporation diminue et l'eau n'est plus absorbée par les racines. Pour pallier le problème, certaines espèces sont équipées de glandes qui leur permettent d'excréter activement l'eau et de maintenir ainsi sa circulation. C'est pas beau la nature ?  

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