Mouette atricille, Leucophaeus atricilla, Laughing Gull


Je sais pourquoi les mouettes ont la tête noire. C'est parce que, contrairement aux goélands, elles n'aiment pas se mouiller la tête quand elles plongent pour attraper du poisson. Elles préfèrent enfiler un casque de bain et, même s'il n'est pas très ajusté autour des yeux, il est quand même assorti à leurs palmes. Les mouettes sont coquettes.  

Oeufs de Pâques


En ce 21 avril, le défi consistait à trouver des signes du printemps. Aussi, pendant que la communauté des observateurs et photographes d'oiseaux du Québec se bousculait à Pointe-Calumet pour observer une paruline de Townsend, une égarée de l'ouest, nous sommes descendus dans l'extrême sud du Québec à la rencontre des premiers revenants.


À la réserve nationale du lac Saint-François, les grues du Canada étaient déjà là et un couple de balbuzards pêcheurs construisait son nid. Quelques rainettes crucifères lançaient des incantations pour éloigner l'hiver pendant qu'une armée de symplocarpes tentait de repousser la neige.


Il parait que leurs fleurs, cachées au milieu de la spathe, dégagent une odeur putride qui attire certains insectes amateurs. Je le crois car je ne suis pas assez souple pour aller les renifler et j'aurais trop peur que la neige gagne du terrain si j'en cueillais une. Dans un mois, les choux puants victorieux se coifferont d'une couronne de laurier et ressembleront à ça.



D'une scie, quatre troncs


Échasse d'Amérique, Himantopus mexicanus, Black-necked Stilt



Je lis dans le "Peterson" à propos de l'échasse: "Grand limicole très gracile; dessus noir, dessous blanc. Noter les pattes rouges, ridiculement longues..."
Pardon Roy ! Parlons nous du même oiseau ? Si l'échasse avait été perchée sur des pattes de canard, c'eût effectivement été grotesque. Mais ici, il me semble que l'élégance l'emporte sur le ridicule.

Ragondin ou Rat musqué ?


Jusqu'à cette visite dans un marais du littoral texan, à Port Aransas exactement, dans le sud-est du Texas, tout était simple pour moi. Aux États-Unis et au Canada, on ne pouvait voir que le rat musqué (Ondatra zibethicus) et en Amérique du Sud, que le ragondin (Myocastor coypus). Tellement facile qu'il devenait  inutile de s'attarder sur les détails pour les identifier comme on pourrait le faire dans certains coins d'Europe où les deux ont été introduits.
Alors voilà, je ramène ces quelques images d'une famille de rats musqués pour ma collection personnelle et en cherchant des informations sur sa répartition, je tombe sur cette carte qui indique la région native de l'animal en rouge et la zone d'introduction en vert. Au Texas, rien, nothing, nada.
Je cherche la carte de distribution du ragondin au cas où et constate qu'il vit au Texas, où il a été introduit.
Sur la carte du bas, les zones rouges hors Amérique du Sud sont des régions d'importation du ragondin.
En fouillant un peu plus, j'apprends que les aires des deux espèces se chevauchent dans cette partie du Texas.
Finalement, qu'est-ce que j'ai ramené à part le regret d'avoir eu trop de certitudes ? Quels sont les critères qui permettent de les différencier:
    Distribution du rat musqué
    Distribution du ragondin
    Osado [Public domain], via Wikimedia Commons

    1. le ragondin est plus gros que le rat musqué; un critère parfois difficile à évaluer, surtout sur des images.
    2. il a une tache blanche autour du museau.
    3. ses grosses incisives oranges sont généralement bien visibles.
    4. ses pattes postérieures sont palmées.
    5. sa queue est ronde alors que celle du rat musqué est comprimée latéralement et donc plus ovale.    
     Ici, tout porte à croire qu'il s'agit de rats musqués, mais...

    Pélicans d'Amérique

    Les pélicans sont de drôles d'oiseaux avec leur énorme bec affublé d'une poche de peau extensible. Contrairement à ce que l'on entend parfois, ils ne s'en servent pas pour stocker le poisson mais plutôt pour l'attraper, à la manière d'une épuisette. En plongeant leur bec ouvert dans l'eau, la pression distend la peau et les deux os flexibles de la mandibule inférieure auxquels elle est attachée, s'écartent pour augmenter le volume. Pour préserver l'élasticité de cette poche, les pélicans ont l'habitude de l'étirer en basculant la tête en arrière.
    Lorsque vient le temps des amours, ils l'utilisent aussi comme argument de séduction en la gonflant d'air. Et, au cas où la poche ne suffirait pas à convaincre, le pélican d'Amérique se laisse pousser une excroissance sur la mandibule supérieure (individus au premier plan de la photo).


    On ne compte pas plus de huit espèces de pélicans dans le monde dont deux en Amérique du Nord: le pélican d'Amérique (Pelecanus erythrorhynchos) qui est blanc et le pélican brun (Pelecanus occidentalis), qui hésite entre le brun et le gris. Toutefois, leurs différences ne s'arrêtent pas à la couleur.
    Ainsi, le pélican brun est un oiseau marin. Il vit sur la côte est de l'Amérique, de la Caroline du Nord au Vénézuéla et sur la côte ouest, de la Colombie Britannique au nord du Chili. Le pélican d'Amérique, quant à lui, est un marin d'eau douce. Il passe l'été sur les lacs du centre des États-Unis et du Canada, puis l'hiver en Amérique du Sud. Son aire de distribution s'étend de plus en plus vers l'est du Canada et, dans quelques années, il pourrait bien faire son entrée au Québec. On commence d'ailleurs à en voir de temps en temps sur le Saint-Laurent à la hauteur de Montréal, au printemps ou en été; peut-être un égaré ou un éclaireur.


    Autre différence, le pélican brun pêche en plongeant sur sa proie après l'avoir repérée des airs, alors que les Pélicans d'Amérique pêchent à partir de la surface. Ils forment un demi-cercle et rabattent les poissons vers un haut-fond où il leur suffit de les ramasser.



    Les pélicans sont de gros oiseaux à l'allure peu aérodynamique. Pourtant, ce sont des planeurs exceptionnels. Il faut les voir raser la crête des vagues en formation serrée, sans un battement d'ailes. J'ai passé de longs moments à les regarder tracer la ligne d'horizon des mers du sud; jamais je ne les ai vu trébucher.

    Plongeur



    Pourrait-on se douter que l'érismature rousse (Oxyura jamaicensis) est un canard plongeur. À première vue, sur l'eau, rien ne le distingue des autres canards: même forme, même flottaison, même bec. Au sol par contre, quelque chose éveille les soupçons. En effet, comme tous les canards plongeurs, il a tendance à se tenir plus droit.
    S'ils se redressent ainsi, ce n'est pas parce qu'ils sont fiers de pouvoir retenir leur souffle plus longtemps. Cela vient de la position de leur pattes qui sont plantées vers l'arrière du corps, rendant ainsi leur propulsion sous l'eau plus efficace. C'est qu'il en faut de la force pour immerger un corps que l'évolution a entrainé à flotter.
    Les canards barboteurs n'ont pas ce problème. Ils ne font que tremper la moitié antérieure de leur corps en basculant vers l'avant. Ils flottent, c'est irrémédiable et le fait d'avoir les fesses en l'air, exposées à la vue de tous ne les rend pas moins fiers. Non, s'ils se gonflent moins la poitrine une fois au sol, c'est parce que leurs pattes ont une position plus centrale.
    Mais, au fait, pourquoi les plongeurs plongent-ils ? Pour se nourrir évidemment. 
    Alors, cela veut-il dire que leur régime alimentaire est différent des barboteurs ? 
    Non, l'organe et la fonction sont intimement liés et comme les becs des deux groupes se ressemblent, on peut penser qu'ils se nourrissent de la même façon; en filtrant l'eau et la vase à la recherche de végétaux et de petits invertébrés. Simplement, puisqu'il en fallait pour tout le monde, l'évolution a fait en sorte que la même ressource ne soit pas accessible à tous au même endroit et au même moment. La nature n'est elle pas bien faite ? En tout cas, c'est que prétendent tous les gens en bonne santé. 
    En passant, pour pouvoir constater de ses propres yeux le bleu incroyable du bec de l'érismature, il suffit de se rendre aux bassins de décantation de Baie-du-Febvre, au bord de la route Janelle. S'il n'est pas encore arrivé, vous n'aurez pas fait le chemin pour rien. Je crois que les oies des neiges y sont déjà.

    Barboteurs

    Il y a deux sortes de canards: les barboteurs et les plongeurs. L'archétype du barboteur, c'est le colvert; à ce point présent qu'on ne le regarde plus, tellement adapté à l'humain qu'on le croit domestiqué, voire nuisible.
    Mais les barboteurs, c'est beaucoup plus que ça: beaucoup plus de couleurs, de sons et de noms évocateurs: sarcelle à ailes bleues, sarcelle cannelle, canard branchu, canard siffleur, dendrocygne à ventre noir, et autres.
    Ils sont aussi un très bon moyen de s'initier à l'observation des oiseaux. On sait où les trouver; il suffit de chercher un plan d'eau. Ils sont assez statiques pour avoir le temps de les observer. Les mâles en plumage nuptial des différentes espèces sont suffisamment différents pour ne pas poser de problèmes d'identification;  les mâles en mue et les femelles suffisamment semblables pour exercer son sens de l'observation. Mais attention, commencer à s'y intéresser, c'est s'aventurer sur un chemin qui risque de vous entraîner plus loin que vous ne l'aviez imaginé.
    Pour éviter de tomber dans le piège, mieux vaut continuer à ignorer le canard aperçu du coin de l'oeil et  prétendre qu'il s'agit d'un colvert.





    Grue blanche, Grus americana, Whooping Crane

    J'ai eu la chance, il y a une quinzaine de jours, de pouvoir observer 10 grues blanches. Chance n'est pas vraiment le mot, car l'endroit est connu des observateurs d'oiseaux pour en abriter et nous nous y rendions dans le but de les voir. Non, je parlerais plutôt de privilège, car il n'en reste plus que 250 environ dans le monde; le monde de cette espèce étant limité au centre de l'Amérique du Nord. 250, c'est peu mais ses effectifs n'ont, parait-il, jamais été très élevés. Cela n'a pas empêché l'humain de la chasser pour la viande et de drainer son habitat pour le cultiver.
    Plein d'espoir et d'incertitude, nous nous sommes donc dirigés vers le "Goose Island State Park" à proximité de Rockport (Texas) au bord du Golfe du Mexique. Guider des excursions ornithologiques m'a appris qu'on ne donne pas rendez-vous à la faune et savoir qu'un oiseau a déjà été observé à un endroit ne garantit jamais que l'on pourra l'y observer. Avec la grue, la tache était quand même plus facile:  l'oiseau est gros, il est blanc et il fréquente les milieux marécageux; ce qui laisse moins de place aux arbres. Ce jour-là, la nature était avec nous; nous les avons trouvé rapidement, à proximité d'un point d'eau comme il se doit, suffisamment proches pour pouvoir admirer au télescope les détails de son anatomie.




    Hirondelle à front blanc, Petrochelidon pyrrhonota, Cliff Swallow

    L'hirondelle à front blanc ressemble à l'hirondelle rustique (ou hirondelle des granges selon à quel moment de la normalisation des noms français on s'est intéressé à elle). Deux détails permettent de les distinguer: la front a le front blanc (évidemment) - celui de sa congénère est plutôt rouge foncé - et sa queue n'est pas fourchue. 
    La situation se complique au Mexique et dans une partie du Texas où l'hirondelle à front blanc peut avoir le front rouge comme la rustique et comme une autre espèce du coin, l'hirondelle à front brun (Petrochelidon fulva). Si la queue est fourchue (queue nettement plus longue que les ailes quand l'hirondelle est perchée), c'est une hirondelle rustique, Si elle ne l'est pas, on regarde attentivement la gorge. La "front blanc au front blanc", la "front blanc au front brun" et la "front brun" ont toutes la gorge rose ou rouge. Seule la "front brun" a la gorge uniformément rose (comme on peut le voir dans la deuxième vidéo de très mauvaise qualité ci-dessous); chez les autres, le rouge est bordé de noir dans le bas de la gorge.
    Au Québec, la question ne se pose pas. On ne trouve que l'hirondelle rustique et l'hirondelle à front blanc blanc, pas la tex-mex, ni l'hirondelle à front brun...quoiqu'elle ait déjà été rapportée.




    Bouteille à la mer

    Quoi de plus agréable que d'explorer le sud du Texas avec sa blonde et ses meilleurs amis !
    Ah oui, je sais: le faire avec sa fille.
    Une autre fois peut-être, il n'est jamais trop tard.
    Bon anniversaire Marie !